Histoires de stades et de tribunaux

Justice

Les épouses Kouachi, elles non plus, n’ont rien vu venir

Les assassins de Charlie Hebdo au moment de leur fuite (Capture d'écran - France 2)

A la barre, les ex-femmes des auteurs des attentats du 7 janvier 2015 ont présenté un témoignage proche d’un copié-collé, malgré deux personnalités visiblement assez différentes. Izzana H. et Soumya B. n’ont jamais supposé, disent-elles, les abominables projets de leurs conjoints, comme remarqué leur radicalisation.

« Je voyais que les caricatures de Charlie, ça le touchait mais jamais il a émis quelque menace que ce soit. Quand je l’ai vu sur la vidéo, quand il sort des locaux de Charlie, ce n’est pas le Cherif que j’ai connu. » On peut croire Izzana Hamyd, appelée à la barre ce vendredi au 18e jour des procès des attentats de janvier 2015 à Paris et Montrouge, quand elle décrit sa vie de couple « normale » composée de deux êtres qui s’aimaient.

Elle n’a pas vu arriver de signes de radicalisation, n’a pas tiqué sur des changements de comportement ou de discours. « Je ne vois pas ce qui a pu se passer chez lui, pourquoi il est parti ce matin là (7 janvier 2015) avec des armes en direction de Paris », témoigne celle qui est née au Maroc en 1980 et a vécu 7 ans avec l’ancien membre de la filière dite des Buttes-Chaumont.

On peut aussi être gagné par le doute en écoutant la veuve de Cherif Kouachi puis celle de son frère Saïd qui lui a succédé à la barre. Soumya Bouarfa, comme sa belle soeur, n’a pas été surprise quand son époux lui a dit qu’il partait de Reims en TGV, direction Paris, pour faire les soldes avec son frère le 7 janvier 2015.

Ce matin-là, il n’avait pas pris de petit déjeuner (comme son frère Cherif, a confirmé Izzana Hamyd), après avoir sauté les deux repas de la veille, à cause d’une gastro, explique Soumya B. « Cela ne vous interpelle pas que malade, il prenne le TGV pour des soldes », relève l’avocate générale.

« On a dit que Saïd Kouachi avait des problèmes aux yeux mais on se demande Madame si vous n’avez pas été aveugle pendant 8 ans. Vous n’avez rien vu ? », insiste de son côté Me Elie Korchia. Lui et ses collègues représentant les intérêts des parties civiles ont du mal à être convaincus par les propos de celle qui souffrirait de sclérose en plaques (elle n’a pas souhaité préciser la nature de sa maladie). Le lendemain de l’attaque perpétrée par son mari et son beau-frère, Soumya Bouarfa est placée en garde à vue.

Le 8 janvier 2015, rappelle le premier assesseur de la cour d’assises, le témoin n’avait pas voulu parler aux enquêteurs. Elle ne trahissait aucune émotion au sujet des attentats de Charlie Hebdo. Pourquoi ne rien dire ? « En fait, j’étais sous le choc, je croyais que c’était irréel, at-elle expliqué vendredi. Je me suis dit que c’était pas possible. Je n’étais pas bien, tout simplement. » On peut la croire, bien sûr. On a aussi le droit d’en douter.