Adil Barki a répété à la barre avoir été possédé par un esprit malin. Ce qui aurait écourté son séjour en Syrie et précipité son retour en France en janvier 2014. Soupçonné d’association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme, il nie, entre autres, avoir voulu retourner dans la zone de guerre.
L’Exorciste s’est invité à la 16e chambre correctionnelle de Paris. Au deuxième jour du procès de la filière djihadiste de Lunel, Adil Barki a parlé de « souffle coupé », de « yeux révulsés », de « crises qui ressemblaient à des possessions » et qui l’ont empêché de poursuivre son séjour en Syrie. « On a fait appel à un exorciseur mais cela n’a pas eu l’effet escompté », poursuit l’homme de 39 ans portant un pull fin gris clair. Celui qui s’est dit habité par « Sheitan » (Diable) quand il était au contact du Coran, a livré les conditions de son départ dans la zone de conflit à la fin du mois de novembre 2013, sans plus de précisions qui pourraient le compromettre alors qu’il est renvoyé devant le tribunal pour association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme.
Pourquoi est-il parti ? « J’étais attristé du sort des civils qui souffraient du régime de Bachar Al-Assad. Voilà, je voulais les aider, explique Adil Barki. Je ne connaissais pas le groupe que j’allais rejoindre, ni la destination. Je n’ai pas pensé à partir avec une autre organisation. » Il est parti une semaine après Abdelkarim Belfilallia (mort en décembre 2014) pour ne pas éveiller les soupçons: « Je ne voulais pas que l’on sache que je partais en Syrie. »Trois jours à Istanbul, puis direction Ankara et 19 heures de route pour approcher la frontière et se retrouver à Azaz, une trentaine de kilomètres au nord d’Alep.
Adil Barki raconte ne pas prêter allégeance quand il est accueilli par le groupe Jaysh Mohamed. Les passeports sont confisqués. « Ça faisait partie de la politique de la maison peut-être », tente-t-il d’expliquer en provoquant quelques sourires dans la salle: « Pourquoi ça fait rire ? ». La présidente lui rappelle que Jaysh Mohamed a été identifié comme un mouvement terroriste et que sa réponse pouvait prêter à l’étonnement. « Oui mais la juge avait dit que c’était le plus light des groupes. »
« Vous me troublez avec vos questions »
Après une semaine d’entraînement physique, Adil Barki n’aura pas droit à la suite du programme comme le maniement des armes puis l’approbation, sorte de validation de diplôme.… La faute donc à ces difficultés d’ordre psychologique. L’émir responsable l’affecte à des tâches ménagères: « Je faisais la cuisine, je cueillais des olives ». Il rentre en France le 16 janvier 2014 par la ligne Istanbul-Marseille, avec le souvenir d’une « expérience traumatisante… Cette désolation, cette pauvreté, tout ça m’a affecté. Si j’avais su, je n’aurais pas pris de billet. »
Triste mais revanchard ? Quand la présidente souligne le contenu de conversations évoquant la volonté de Barki de retourner en Syrie, il nie puis affirme que ceux qui ont dit ça « n’ont peut-être pas compris ». Et ce SMS vers un numéro philippin ? « Je ne m’en souviens pas ». « Vous me troublez avec vos questions », lâche-t-il à la présidente quand elle relève d’autres textos, relatifs à des informations sur Daesh ou l’instauration du Califat.
Il reconnaît, oui, avoir parlé de l’établissement de l’EI avec Hamza Mosli, un des trois prévenus présents dans le box (les deux autres comparaissent libre), soupçonné d’avoir joué un rôle de recruteur. Sa personnalité sera à son tour étudiée la semaine prochaine. L’audience reprendra lundi à 13h30.
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